Le Handicap ... cap sur Handy ???

Spaz m'a soufflé le sujet de cette note (elle n'ose pas l'écrire ici tellement elle est timide !!! la pôvre ! alors je serai son porte-voix !)

Qu'est-ce que le handicap ???

Quelle définition donner à ce mot ???

Texto en anglais ça veut dire "la main au chapeau" car les "handicapés" avaient l'habitude de faire la manche ... et donc d'attirer la pitié !

Sans l'AAH (Allocation Adulte Handicapé), on voit bien encore bon nombre de personnes handicapées tendre le chapeau : dans les pays pauvres ... ou même les rues de Paris ...

Ne pas avoir de mémoire, est-ce un Handicap ???

Etc ... La question reste posée ...

Et être timiiiide, c'en est un, de handicap? (vouiiiiiiiiiiiii! )
Si on veut définir le mot, on hésite devant sa polysémie:
C'est d'abord un terme de course hippique (cf: http://www.cnrtl.fr/definition/handicap, il s'agit de donner des chances équivalentes à des concurrents de forces inégales; puis par extension, ce qui empêche de réaliser pleinement des possibilité; enfin, une déficience mentale ou physique. Le mot vient de l'anglais hand in a cap, "main dans la casquette", référence probable à la façon de parier pour des chevaux impliqués dans des courses à handicap.

Au-delà du mot, se pose le problème de la reconnaissance du handicap. Se reconnaître handicapé, l'accepter, condition sine qua non au dépassement de sa condition (et de son conditionnement!); reconnaître le handicap d'autrui, et la nécessité de la solidarité, de la fraternité comme on dit sur le fronton des bâtiments publics (peut-être pas Bercy), n'en déplaise à Darwin...

Merci Cat de lancer la discute ... Des avis sur la question, tout le monde?

De toute façon le handicap existe (c'est certain), mais ce que personne ne sait, c'est que tout le monde en a un mais se refuse de l'avouer (comme la timidité par exemple)

C'est ton handicap, Spaz, d'être un escargot !!!

J'ai été plus rapide pour mettre ici ton idée ...

Alors Spaz ? timide ???

Te définis-tu comme handicapé(e) ???

Moi tantôt oui, tantôt non !!!

Par exemple, Je crois bien faire ... en faisant le "pitre" avec mes jeux de mots ... en mettant de la vie et on croit que je veux "casser l'ambiance" !!! non, pas du tout !!!

J'ai un humour mais qui ne se veut pas méchant ... ce sont plutôt des questions pour faire réfléchir, pour creuser l'écorce et aller au-delà de l'apparence ...

Houla ! chaud ! la timidité est un vilain défaut mais pas les pruneaux... d'Agen, bien sur !

M. Cirius est l'exemple même de l'humour "méchant" ...

exemple à ne pas suivre donc !!!

Donc, puisqu'accident du travail il y a eu, parlons-en. Pas de pleurs, ni plainte: il y a pire. Près de 20 ans déjà; à Hal, ma ville natale près de Bruxelles=pur hasard. Le 11 mai 1989 - 12.35 hrs.
Hasard: j'étais directeur export à Paris, ayant convaincu un nouveau PDG qu'il fallait une filiale directe en B, j'en étais devenu le créateur et directeur général début mai, tout en gardant ma fonction antérieure; effectivement prendre un avion de Roissy ou de Bxl importait peu. Ce 11 mai, arrive un camion des usines françaises pour la mise en stock de matériel de stockage-manutention dans un bâtiment dont ns avions loué une surface.

Le camion est dans un quai d'entrée, à moitié déchargé, hayon derrière baissé à mi-hauteur, je prenais des photos. Après la pause le conducteur d'un gros, très gros chariot élévateur reprend le déchargement, lance son moteur diesel avec grand bruit, oublie toutefois qu'il était resté en prise et me fonce dessus. Me pousse contre le hayon arrière, sa folle course ne s'arrêtant que grâce aux fourches qui butent dans le soubassement du camion.
Je me trouve renversé sur le hayon et mes neurones belges n'ont fait qu'un tour: au lieu de crier banalement "au secours", je gueule "arrêtez - arrêtez". Ce qui était déjà fait au fond.

La douleur lors du choc ne peut être décrite, disons manque d'expérience et pas d'échelle de comparaison. Il y avait aussi du visuel: une fontaine franche et en très joli rouge, pissait mon sang, comme Manneken-Pis, voire mieux. Première chance: le conducteur maladroit était aussi le secouriste maison: il a posé le garrot où il fallait, en coupant d'abord mon pantalon d'un nouveau costume "Prince de Galles" (C'était l'époque)

Suite au prochain numéro. Pour l'instant: photo de l'entrée de la clinique St Jean & Elizabeth à Bxl.

Je me permets de continuer: avant d'arriver à la clinique de la photo, évacuation sur la clinique Ste Marie à Hal, à peine 5 kms. Coîncidence: la petite clinique-maternité, où ma mère a accouché de moi, le 16/11/1941! Radios avec un peu de mal, vu les fractures, pour 'avoir le bon angle. Question de l'opératrice: "puis-je continuer à couper votre pantalon, monsieur". "Allez-y jusqu'au bout". Le temps passe, le garrot-pansement se teinte de plus en plus et je me rends compte que cette petite clinique de proximité n'a pas les moyens d'intervention pour la situation. Je m'adresse au monsieur en blanc, sans badge (non, ce n'était pas le Pape, réf. à une vieille chanson de mon pote Léo): Monsieur, appelez la clinique ST. Jean, Melle Lydia S..., qui est ma soeur". Il riposte:" Calmez-vs Monsieur, vs êtes en état de choc" Comme j'avais quand même une déjà longue expérience de commander des hommes en entreprise (non, non, je ne suis pas un dictateur), j'ordonne une ultime fois en ajoutant que ma soeur y est DRH du personnel soignant et infirmière . Donc: 30 ' après, arrive ma soeur+une infirmière+une ambulance. Par radio elle a obtenu un bloc chirugical, des motards pour foncer.... Avouez: quelle chance et quelle coïncidence!
Lors de ma sortie sur le brancard, entouré d'un collaborateur et du monde de l'entreprise responsable, je fais un V triomphal des deux mains. Ce V pourquoi: pour dire, je suis bien là ou plutôt pour exprimer "ils ne m'auront pas"? Les "ils" étant: le destin, la malchance, le mauvais sort. Ou plus égocentriquement: voyez comme je suis fort????

Probablement, car une fois dans l'ambulance, j'ai dit à ma soeur: là, j'abandonne et je me suis mis à pleurer de douleur. Le V était bien celà: soigner mon image d'homme conscient, maître d'une situation inconnue... Prétention quand tu nous tiens.
Suite au prochain numéro, sauf si quelqu'un me demande d'arrêter ce récit sanguinolant.

Photo prise par moi le lendemain, après l'intervention, en réa quand ma première requête en présence de ma femme+fille cadette (14 ans) accourues depuis notre Val d'Oise, était: "Où est mon Nikon?" Preuve que mes jambes étaient touchées, mais pas la tête. Explications techniques dans 2 jours

cit :"Le V était bien celà: soigner mon image d'homme conscient"

Je ne crois pas qu'il s'agisse de "soigner" une image, mais tu as puisé dans des ressources de forces terribles dans une situation d'urgence, et je ressent ce gestes aussi comme un soulagement non?
Une victoire sur sois davoir maîtrisé une situation où beaucoup auraient flanché, je n'y vois nulle prétention.

Il y a des moments où les personnes apparement fragiles (ou nous tous qui penserions ne pouvoir y arriver) pouraient avoir des sursauts de forces incroyable et démesurées face à certaines situations.

Walter SALENS a écrit:

Suite au prochain numéro, sauf si quelqu'un me demande d'arrêter ce récit sanguinolant.

Pas de problème...

Merci pour le "Feu Vert" d' Anas et ses commentaires. Avant tou cela, je n'avais jamais connu ni maladie particulière, ni même une jambe cassée au ski, que je n'ai pas pratiqué. Dans ma jeunesse Belge, le ski n'était pas pratiqué et réservé aux happy few.

Le jargon médical m'etait tout autant inconnu. Quelques termes du dossier médical: fracture comminutive des deux plateaux tibiaux avec ischémie aigue du membre gauche - incision arciforme dans le creux poplité, prolongeant la fasciotomie postérieure - on retrouve une artère de gros calibre au sein même de ce magma musculaire. Elle est complètement désinsérée du segment inférieur. Le segment supérieur est retrouvé sans gros problèmes. On prélève la veine saphène externe, qui sera inversée.

Je m'arrête et ne courrez pas à votre Larousse ou autre Robert. La lecture de ces rapports, amusante après, montre surtout la complexité de la chirurgie, non pas pour "coudre" ensemble veine ou artère, mais pour bien définir la casse et choisir la solution. Impressionnant, comme toutes les docu-télé sur la médecine, surtout vingt ans après avec toutes les nelles techniques, moins intrusives.

La photo antérieure, montre ainsi la gauche suspendu, en traction, la face postérieure (invisible) à nue avec la plaie non fermée et aspergé par quatre tuyaux en permanence d'un liquide marron désinfectant qui s'écoule dans une bassine logée dans un creux découpé dans le matelas. La droite est plâtrée et sera mise en traction plus tard.

Si la circulation est trouvée satisfaisante juste après l'intervention, les séquelles éventuelles sur le plan nerveux restent floues: "Du point de vue nerveux, les nerfs sciatiques poplité interne et externe étaient étirés, mais semblaient être conservés".
L'arrière de la gauche ne se fermera qu'un mois plus tard par une greffe cutanée.

Une photo en antcipation sur la suite. Faut que je la retrouve.



Une quinzaine après la greffe: un peu comme les momies égyptiennes.

Les 5 semaines entre l'AT et la greffe ont été dès plus pénibles, même pas envie de prendre des photos. Pourtant, encore de la chance: la présence de ma soeur, qui m'apportait chaque matin un journal flamand et un francophone, dans cette chambre individuelle je pouvais fumer (eh, oui), libéralité appréciée la nuit par les infirmières de garde, qui venaient clopper tout en me tenant compagnie, leur présence faisait du bien au moral.
Visite chaque WE de ma femme et notre fille cadette (14 ans), mais parfois je plongeais dans un mutisme dépressif par la douleur. Visite aussi de ma mère de 77 ans, bon pied bon oeil, bien qu'elle fera le grand départ moins de 2 ans après par un cancer fulgurant.

La douleur: comme dit déjà indescriptible, car jamais vécu. Souvent, vers 14 hrs je réclamais avec insistance une injection. Chaque fois, l'on me demandait de patienter. Quel soulagement quand vers 16 hrs, ils m'offraient un morceau de sucre imprégné, non pas de cognac, mais probablement de morphine.....

Mon diabète d'avant, a disparu complètement pendant ces 3 mois en clinique.

Curieusement, je n'ai jamais songé à des séquelles quelconques: je restais 100% convaincu que je serais comme avant.
Optimisme naturel et aussi par le soutien de ma famille, de l'entourage médical et des infirmières super-dévouées et souriantes. (Certainement pas parce que ma soeur était leur DRH). Un élément particulier qui contribuait à cette optimisme: accidenté du travail= pas de coûts médicaux à assurer, salaire assuré (sans partie mobile toutefois), AR Paris-BXL payés par l'employeur.....

Après, en centre de réeducation, j'ai découvert que beaucoup d'autres accidentés n'étaient pas aussi chanceux.

Quand la jambe ouverte était prête pour la greffe: quel espoir et soulagement. La chirurgienne, une femme d'une douceur délicate, m'avait rassuré sur la bonne fin de son intervention, tout en soulignant que le seul Pb ,avant, était de me mettre sur le ventre, tout en maintenant la gauche dans ses étriers de suspension. Effectivement, 4 infirmières et moi ont rigolé comme des gosses pendant ce retournement.

Ces quelques semaines de douleur profonde ne m'ont jamais hanté, ni en rêves ou cauchemars. Comme quoi, la nature fait bien les choses.

La Photo : un peu avant la greffe: un verre de champagne, que j'expliquerai plus tard.

Détail: je sais pourquoi les fakirs peuvent se transpercer ici ou là: les étriers sont raccordés à des tiges (inox bien sûr), traversant le genou et le mollet. Magique non? Néanmoins, par les mouvements, elles peuvent être moins bien centrés. Le médecin, parlant de choses et d'autres, détournant votre attention, tapent avec la main assez fortement pour les équilibrer. Une seconde et demie de douleur.

Ton histoire est incroyable, tu as l'air si serein aujourd'hui, je t'admire.

La photo précédente se complète avec celle en bas. Et commence petit à petit à évoluer vers les conséquences sur l'emploi. Mon assistante commerciale Joëlle était venu me voir avec ma femme et Eva la cadette. Joëlle me parlait de Paris tous les jours vers 16 hrs. Elle m'informait sur la division export et de tout ce qui se tramait en coulisses concernant la filiale belge. Entretemps le PDG était venu me voir et je savais qu'il avait pensé que l'accident restait assez banal et que je serais sur pied rapidement. La réalité était bien différente et comme lui n'avait aucune expérience Export,il a demandé au directeur régional du Nord de me remplacer temporairement, puisque basé à Lille.

Ce dernier, me rendant visite, m'avouait que sa propre région traversait quelques difficultés et qu'il avait accepté la mission contraint et forcé.

Donc champagne pour les retrouvailles avec Joëlle, avec qui, 20 ans plus tard, ns sommes toujours en contact. D'ailleurs, elle a réussi à s'imposer et 2 ans après elle est devenu Responsable Export avec succès. Je l'avais embauché en 1987, à 22 ans et elle était déjà très performante. De plus, après, elle a démontré que la femme peut aussi réussir dans ce métier difficile, sans avoir fait une grande école ou HEC. De plus, elle avait quitté sa ville d'Orthez pour "monter" à Paris à 20 ans. Sacrée Joëlle. A souligner qu'elle m'a beaucoup soutenu le moral pendant cet épisode. Merci JO-JO

Sur la photo, remarquez mon pied gauche, posant sur une planchette. Explication au prochain numéro.

Après la greffe, j'ai pu quitter la chambre en fauteuil. Fait des ballades jusque sur le toit-terrasse, dans l'étage machines (chauffage et autres...) interdit bien entendu, vers le parking et la rampe de sortie des voitures.... Quelle liberté retrouvée!

Sur la photo en contre-jour, agrandissez please: une perfusion électrique, car pour ne pas faire simple, le lendemain de la greffe, je me suis offert une petite embolie pulmonaire, par chance au moment où l'infirmière de nuit goûtait sa clope avec moi. Sensation simple: j'étouffais soudainement. Ni 2, ni 3: masque d'oxygène, médecin de garde, surveillance toute la nuit au monitor... Et dire que je ne savais qu'à peine ce qu'embolie voulait dire. Pas le temps de paniquer.
Le lendemain scintigraphie pour localiser le caillot coupable et mise en place de cette perf, anesthésie locale, sous la clavicule droite. Vers je ne sais où?

Seule limite à mes ballades: recharger la batterie pour la perf avec dosage.

Sur la photo où je contemple Bruxelles: à gauche de mon profil: la tour ovoïde de la banque nationale, le clocher d'une église baroque, derrière la grue la Cité administrative (dont mon père, conducteur de travaux, a été responsable pendant la construction) et tout à gauche cette tour, qui héberge depuis peu les services administratifs de l'handicap.

Or cette tour, après cette adaptation en 2008, n'est point accessible aux PH!!!! Je l'ai appris par vivrefm 93.9. Incompréhensible, mais Belge. J'ai honte pour eux.

J'oubliais la planchette sur la photo précédente: de fait, le pied gauche commencait à tomber, la jambe gauche, en-dessous du genou, quasi-insensible et je ne pouvais bouger ces doigts de pied. Heureusement que je restais ignorant de la signification réelle du phénomène, restant comme dit déjà, convaincu que tout se rétablirait le moment venu.

Comme quoi, il est parfois utile que les spécialistes ne disent pas tout au patient.

Bonne lecture et bon week-end: cheese please
Walter

Fin juin: tout va pour le mieux: embolie oubliée, greffe se cicatrisant sans Pb, besoin de personne pour passer du lit au fauteuil, écoute de ma musique sur K7, visites de ma mère, nièces et ma famille chaque WE. La kiné de base peut commencer pour arriver à une mise debout. Parlote très familière avec une Kiné, que j'ai pu conseiller pour offrir un objectif zoom à son mari, débats avec un jeune aumônier catho. Instructif: athée qui taquine le croyant, comme trente ans avant je taquinais un oncle-père dominicain.

Ma grand'mère maternelle a eu 6 enfants et sur sa tombe il y avait un petit texte, brodé par un autre oncle, qui disait : "... et la plus belle perle à sa couronne est la prêtrise de son fils cadet" . En flamand, le texte était en rimes.
J'avais ainsi un petite expérience des raisons de leur choix, leurs commentaires francs sur ce que leur grand Chef disait (imposait) et aussi de leurs doutes.

Rupture avec une psy après un premier entretien: femme pourtant, mais voulant me convaincre d'avoir absolument besoin d'une thérapie psychologique. Au fond, une erreur de communication de sa part: en face d'un patient inconnu, il reste dangereux de trop souligner d'emblée qu'il est devenu "handicapé" ou qu'il serait faible dans un futur proche.

D'autant plus que mes visiteurs, contacts avec trois médecins spécialistes, les infirmières et d'autres.. m'offraient déjà une aide psychologique indirecte, par l'écoute et les échanges sur tout et rien. Je suis reconnu pour arriver avec tout le monde (sauf les c...) à une connivence où les deux parties s'expriment et échangent. Devant un inconnu, se contenter de dire: "bonjour, enchanté de vous connaître...", sans aller plus loin, apporte peu.

KINE: massage des deux jambes, stimulation électrique du triceps au-dessus du genou gauche, gym sur le rameur. Le plus dur en ce 3ième mois à la clinique: torture sur le KINETEC (matériel français). Voir photo et suite au prochain numéro.

Ns sommes autour du 5 juillet = 20ième anniversaire de notre mariage. Ma soeur Lydia avait organisé une petite fête dans la grande salle du conseil d'administration. Avec ma femme (Lydia aussi), nos deux filles Liv et Sarah et ma mère, toujours bien active à 77 ans. + petits fours + drinks + gâteaux avec Haut Médoc 1986. Tout cela sous les deux portraits du roi Baudouin et de la Reine Fabiola. (Dans une république vs n'avez qu'une photo, quoi que.... sait-on jamais)

La photo du jour pour une raison: la seule sur laquelle vs voyez bien les 2 petits drapeaux sur la perche: français+belge. Oui, bien que Belge dans une clinique belge, j'étais aussi contribuable français depuis 1971. Visage luisant: été 89 très ardent; clope comme toujours...

Encore en fauteuil , champion vitesse et adroit. Pas encore debout, car il fallait passer par la TORTURE sur cet engin KINETEC. Vs y voyez le ficelage de la cuisse et de la jambe sur deux plans. Un petit moteur va rapprocher la jambe vers la cuisse: donc pour plier la jambe. Au départ l'angle entre l'horizontale et la jambe pliée n'était que de 65°.

Ma charmante kiné va lancer la manoeuvre quotidienne d'une façon vicieuse, mais de fait astucieuse. Elle me confie la télécommande qui lance le pliage, avec possibilité de régler la vitesse et surtout d'arrêter dès que cela devient "trop" douloureux. Maître de mon destin pendant 3 jours. Mais:

4ième jour: elle m'enlève la commande, règle la course et lance le mouvement. Son règlage: quand le genou plie de plus en plus la vraie douleur, inconnue jusque là. Au début, je gémis quand le genou est au plus haut, pour redescendre après.

5ième jour: nouveau règlage, vitesse plus élévée, arrêt plus long au point haut: je crie fort pendant la durée de l'arrêt haut. De fait mes cris s'entendaient jusque 2 étages plus bas. il m'a fallu deux jours de plus pour ne plus crier alors que la douleur s'amplifiait.

Ma technique, car j'avais honte de moi et de plus, je savais que la TORTURE méchante ne se pratiquait pas dans mon pays natal. Donc: se dire "je sais que la douleur va arriver et monter en puissance, je respire profondément pendant la montée, je sais que le maxi dure 8 secondes : bloques ta respiration, sachant que la douleur se dissipe dès la descente de la jambe. Méthode gagnante.
Après une semaine, la kiné (que j'ai détestéel e 4ième jour) m'explique que leur crainte était de devoir opérer directement le genou si l'extension serait restée insuffisante.
Pb: comme hier, l'hébergeur ne veut pas héberger la photo, bien que le lien apparaît dans le brouillon. Doit y avoir une raison.
Prochaine épisode avec la première mise debout sur 2 pattes comme tout un chacun.

Ouf, la photo de hier y est. Donc sur 2 pattes; je ne suis même pas passé par la phase "à quatre pattes" comme les bébés.

Mon sourire: pas pour la photo, tout simplement heureux de cette nouvelle étape.
Attention: premiers jours, seulement sortir de la chambre, aller jusqu'au mur opposé du couloir. Derrière la jambe gauche: pied et jambe de la kiné, à qui j'avais pardonné la torture Kinétec.

Entretemps, une orthèse en matérieu dur avait été façonnée, car l'extension de la jambe restait insuffisante.

Une rose : oui, j'adore les roses et particulièrement "ROUGE" en ces temps-là. Depuis, il n'y a plus que les roses de ma femme qui m'inspirent.

Tous les accidentés, après quelques mois dans un lit, doivent éprouver cette joie d'être, enfin, "droit dans ses pantoufles".

Justement, je ne suis pas le seul accidenté, qui va connaître peine-douleur-joie... et retour vers la vie active, avec des séquelles ou difficultés plus tard. APPEL à témoignages ardemment espéré.

Ainsi je déambule dans les couloirs. Fauteuil reste indispensable. Le départ approche, car la clinique estime ne pas pouvoir aller plus loin pour la rééducation. Une ultime examen, complètement indolore et pour cause: que sont devenus les deux nerfs sciatiques dans cette jambe gauche? Un examen électronique est pratiqué, dans une chaleur étouffante. Le spécialiste implante une aiguille fixe au-dessus de la cheville, puis il pique légèrement à des endroits spécifiques une autre aiguille, il envoie de modestes courants électriques et puis RIEN! Les nerfs ne laissent rien passer. Ce qui s'appelle une dénervation complète.

Donc indolore et toujours optimiste, ne me rendant pas compte de la réalité de la situation.

Je quitte la clinique St. Jean le 9 août, en ambulance vers Bouffemont. Retour au bercail, accompagné de ma fille aïnée. Je resterai assis sur le brancard pour voir par la partie haute des vitres, le paysage tout au long de la A1 : champs de blés, soleil, ciel bleu...
Dernière photo avec une petite mise en scène: le journal flamand du jour, photo des dernières fleurs reçues, une carte qui dit "Together we're STRONG" (Oui, si modestes et plus aisés pouvaient faire cause commune!), ma jambe et un petit ballon offert par Eva: "Get Well Soon" avec une petite carte, égarée depuis. Ce petit ballon, gonflé, résiste toujours. Sur la petite carte message en english: "Some english for my dear papy who speaks a good english. It's for my dady that I love" Emouvant non? Ouf, depuis elle a amélioré son anglais.



Au prochain n°, je rendrai un petit hommage à cette clinique, concernant le premier service de soins palliatifs, lancé par l'ancienne directrice Soeur Léontine. Innovant en 1989.

La clinique St.Jean & Elizabeth: fondée par des Soeurs, privée et conventionnée. A l'ancienne, avant que les cliniques privées (en France et ailleurs) deviennent des centres de profit trop souvent. L'histoire de notre famille et cette clinique est longue: une petite soeur de 3 ans y a été soignée pour la mucovicidose jusque fin 1953 et son départ définitif.
Ma soeur, après son bac, y a fait ses études d'infirmière et y est restée jusqu'à sa retraite.
En 1989, il restait bien peu de soeurs, sans cornettes d'ailleurs, habillées sobrement en gris et réellement modernes d'esprit.

Soeur Léontine, médecin et ancienne directrice: femme pétillante, optimiste, plein d'humour. A sa retraite elle a démarré sur un étage, le premier service de soins palliatifs. Innovant absolument, puisque cela signifiait d'abord la maîtrise de la douleur. Je lui rends volontiers ce peit hommage, car cette pionnière le mérite amplement.

Petit détail particulier: la Reine Fabiola (toujours alerte) y a été soignée plusieurs fois en rapport avec sa difficulté pour enfanter. Par discrétion je ne puis en dire plus. Amusant: ma mère un jour, dans l'ascensur, s'est trouvée face à face avec Simone Veil.

Mes deux parents s'y sont éteints doucement, mon père en 1985, maman en 1991.

Photo: émotion de ma femme, quand les ambulanciers ont bien voulu s'arrêter un instant devant notre maison, avant de faire les 2 kms vers le Centre Jacques Arnaud.

Tout de même: y habitant depuis 10 ans, ce centre restait connu sous le nom de "Centre de Cure". Je pensais qu'il s'agissait d'une centre où les "vieux" venaient boire une eau magique etc. Voilà que je vais y entamer environ 3 mois de rééducation et y rencontrer d'autres patients, plus gravement atteints et beaucoup moins chanceux que moi à tous points de vue.

je suis en retard de deux postes.

mais je lirai ça tout à l'heure!
Bon après midi Walter.

De retour après une semaine active. Centre J. Arnaud: appartenant à la Fondation des Etudiants de France. Le bâtiment central remonte au début du siècle dernier. A aussi été un pensionnat pour jeunes filles de "bonne souche". Reste des vestiges en béton des portiques balançoires, piscine plein air entouré de colonnades en ruïne.. le tout dans un grand parc avec des arbres centenaires.

La photo: l'entrée historique avec les escaliers, les patients entrent sur 2 pattes ou roues par l'arrière, de plein pied. Rééducation=salle de kiné. Deux fois par jour, 40 minutes environ. Equipement traditionnel: des lits kiné, massages.. les petites cages grillagées où le patient mettra ses pieds par ex. dans un étrier avec un poids et qu'il doit lever cette charge par traction sur une poignée avec les bras. Le tapis de marche entouré de 2 rampes pour refaire les premiers pas, avec orthèse, prothèse..... Au centre, espace ouvert pour des jeux au ballon (medecin-ball), pour vérifier la réactivité des bras récepteurs, la perception visuelle dans l'espace...

Avec des blouses blanches, hommes et femmes. Très vivant puisqu'environ 20 personnes en même temps.

Mon démarrage dans cet espace: de la douleur à cause de cette jambe gauche au pied pendant, par la situation encoe obscure des nerfs sciatiques. Le kiné avec ses mains oblige ce membre rebelle à mieux plier et à parfaire l'extension. Douleur acceptable, sauf un détail: toucher le pied provoque des douleurs étincelantes (invisibles quand même), électriques au voltage incoonu, à hurler. Ayant appris à maîtriser cela de par l'aventure sur le KINETEC, je ne faisais que gémir. Au bout de 2 ou 3 minutes, par chaleur de la main du kiné, ces fulgurances s'atténuaient. :pas content:

Parlons des autres patients: l'amplitude de leur situation pousse à l'humilité. Une femme du Sénégal avait reçu un coup à la tête du gros rétroviseur d'un bus, virant très court (trop) à un carrefour en ville. Dégâts neurologiques: la tête peu mobile, toujours penchée du même côté, peu de réaction visuelle et que de gémissements pendant la kiné destinée à masser et bouger le bras gauche. 20 ans après, j'ai encore son image dans la tête et quand je suis parti, cette femme n'avait que peu progressé.

Un homme, cinquantaine, frappé par un anévrisme dans la colonne, les deux jambes soutenues par des attelles sophistiquées pour marcher avec grand effort.

Puis un homme, même âge, étalé souvent sur une grande planche, comme un crucifié, à des inclinaisons différentes. La rumeur était que cet homme prétendait être fils d'ambassadeur, piqué par un insecte en Amérique latine, parlant anglais....Rumeur, car certains ne le croyaient pas. Il y a avait aussi une attitude un peu désinvolte des soignants à son égard. Quand je devenais un peu plus mobile, j'ai conversé souvent avec lui. Tout était bien la vérité. Et nos conversations se faisaient en anglais, ce qui lui faisait grand plaisir. Moi-même ne pouvant déviner que je ne pourrais plus continuer à pratiquer, comme fait pendant 25 ans, cette langue qui était quasi ma 2ième langue maternelle.

Détail sur ce bâtiment: notez les balcons un peu noirçis, a été rénové totalement depuis.
Bonne fin de dimanche
Walter

Sous la pluie sur IdF.
Retournons au soleil d'août-sept 89. Oui, il y a des injustices: un ouvrier magrébin, intérimaire, travaillant sur une ligne électrique, moyenne tension: sévères brûlures 3ième degré au cou, traversant la poitrine et une main affreuse. Imaginez les douleurs, avec renouvellement des pansements deux fois par jour. Imaginez aussi son problème administratif: son contrat d'intérim n'était pas signé par le sous-traitant dès le premier jour. Les gants protecteur non-conformes.
Un ouvrier-technicien dans l'entretien des ascenseurs : un échafaudage roulant de 6 m de haut s'écroule: fractures sévères aux jambes. Et le chef d'entreprise veut absolument prouver qu'il s'agit d'une "faute impardonnable" de son salarié. Or, il appartient au chef d'équipe de faire respecter les consignes de sécurité. En occurence, il semblait que les roulettes n'étaient pas correctement bloquées.

Pendant env. 7 semaines, la kiné provoque des périodes dépressives de par l'inactivité obligée entre ces 2 séances par jour. Lors de la visite quotidienne de ma femme vers 16 hrs, je pouvais lui dire 10 mots, en me réfugiant dans le silence ou la somnolence. Dur pour la famille. Le dîner le soir en self (excellent), avec certains amis, était salvateur pour ces soirées longues avant le coucher du soleil. Personnel très sympathique.

J'oubliais presque mes petits copains de tous les matins, sur le balcon. Appareil bien caché par les rideaux, sans mouvement brusque.



Mérite d'être vu en grand. Et sur ce forum de Harper tout est possible.

11 février 2009 : QUATRE ANS depuis la loi de 2005/ FAUT-IL CLAMER "Joyeux Anniversaire"????

Ns progressons vers l'automne, je supporte mieux la kiné, toujours en fauteuil, parcours dans le grand parc, jambe gauche gainé d'un bas de contention tout blanc (marque Kendall, ce qui plus tard va provoquer un litige avec la Sécu). Son port permanent commence à atténuer les douleurs vives et améliore le retour veineux. Musique K 7 et radio, plus visiteurs de mon équipe export me font toucher le monde réel, ce dernièr tourne et n'a pas besoin de moi.

Une visiteuse du marketing,( visage comme la jeune I. Adjani) sort ébranlé d'avoir vu au self, tous ces patients plus ou moins abîmés. Eh oui.... Un jeune ado trisomique avec l'attirail métal sortant de la jambe fracturée, pour maintenir la broche: toujours souriant et un dialogue charmant enfantin. Plusieurs jeunes sont dans un bâtiment moderne de l'autre côté du parc, service dédié aux personnes en grave désordre psychologiqe: suîcidés non réussis, marginalisés en rupture de famille..... , drogue. Que de découvertes à faire.

Le shot: au travers des fenêtres de l'étage au-dessus de la grande entrée du vieux bâtiment: endroit pour lire et contempler. Les arbres au fond sont éloignés d'au moins 150m et à gauche un petit bout de l'immeuble moderne. Depuis une grande extension a été construite, comme quoi le besoin en direction de ces jeunes n'a fait que s'amplifier.


A demain
Walter

AOUT 89: fauteuil presqu'abandonné, deux béquilles, promenades modestes dans le parc, à l'ombre sous les immenses arbres, pied moins sensible.... mon assistante Joëlle me tient au courant de ce qui ce passe dans l'entreprise. Meilleure humeur, surpris par une infirmière entrant dans la chambre sans frapper, avec ma femme (pas besoin d'un dessin).
Bientôt la piscine très chaude: et comme Archimède l'a dit depuis toujours: dans l'eau l'on s'y meut plus facilement.
Photo: la rotonde délabrée, remise à neuf depuis, et un homme présent chaque jour à la même heure. Technicien chez PSA, chute d'un échelle dans son cerisier, dégâts aux 2 chevilles et tassement assez rude de la colonne. Accident privé, visité régulièrement par ses collègues et dans sa chambre avant 20 hrs, plusieurs se réunissaient pour watcher le Bêbête-show de l'époque Nourrissant ainsi la conversation au self. Cela aussi contribue à l'optimisme, bonne humeur, pour oublier sa situation personnelle. Cet homme doit être à la retraite maintenant, en bonne forme j'espère.

Au coin supérieur gauche, vs apercevez un petit bout du bâtiment moderne où se trouvent salle kiné, piscine.

Depuis quelques années, le feu d'artifice du 14/7, se tient sur la grande pelouse, après une descente au flambeaux (chinois) de la mairie jusqu'au centre. Beaucoup de monde s'y presse.

Des chambres par un tunnel suspendu, en pente descendante, l'on arrive dans le bâtiment moderne avec salle de sports (basket en fauteuil par ex.) la kiné, la piscine. Béquilles certes, adroit sur les escaliers (un bon entraînement), déjà la piscine très chaude.
Entrée prudente par une pente avec deux barres pour ce tenir. Archimède avait raison: se mouvoir et nager avec aisance.
Anecdote: j'y étais souvent avec un patient, noir, qui prétendait être le fils du président des Comores. Il parlait de la vie dans cette ancienne colonie, très humour;comme il s'appelait Mohamed, ns n'avons jamais su si tout cela était vrai. La kiné responsable de cette balnéothérapie, toujours présente: je lui ai fait découvrir Leoard Cohen, vu un an avant l'accident au Grand Rex en 1988. Lui ai offert le CD "I'm your Man" (que je n'étais pas), "First we take Manhattan, then we take Berlin"


Shot : un des graphismes sur les murs-béton brut, qui mènent au bâtiment de l'espoir. Faut-il y voir des morceaux d'un puzzle qui ne s'emboîterons que difficilement pour les fractures diverses et les autres séquelles?
Approche maintenant la possibilité de rentrer à la maison pendant le WE. F dans le coffre, sortie triomphante sur béquilles.
Ce sera la prochaine photo.
Bon vendredi 13
Walter